En Résonance avec la 17ème Biennale d’Art Contemporain de Lyon

Interval n’est pas seulement une oeuvre à voir ou à écouter, mais un espace-temps à habiter, à expérimenter dans sa fragilité et sa fugacité.

Interval conjugue les registres de l’intime et du symbolique à travers une expérience multisensorielle où l’espace se pense autant qu’il se ressent.

L’oeuvre se déploie comme une cartographie des liminalités, là où les frontières entre réel et imaginaire s’effacent pour laisser place à une exploration de l’indétermination. Chaque acte — structuré autour de la maison, de la forêt, de la grotte et de la plage — devient à la fois site de mémoire et espace de révélation, un territoire où se joue la dialectique du visible et de l’invisible, de la matérialité et de l’éphémère. 

Ces espaces s’éloignent de leur statut de simples décors pour devenir le théâtre d’une mise en tension constante entre l’intime et l’infini, l’intérieur et l’extérieur.

Chaque tableau est traversé par une vibration sonore, et l’album musical, pensé comme une bande originale, accompagne et structure le parcours visuel, créant une immersion totale où chaque élément trouve écho dans l’autre. 

Ainsi, Interval se vit moins comme un objet de contemplation que comme un processus de transformation, où chaque espace est un seuil à franchir, une zone de passage où se négocie l’altérité du soi. 

Les oeuvres, soutenues par leur dimension musicale, suggèrent que toute construction — qu’elle soit matérielle ou mentale — est appelée à disparaître, laissant place à l’incertitude et à la vacuité. Cette impermanence, loin d’être une fin en soi, est ici envisagée comme le point de départ d’une renaissance continue, une ouverture vers de nouvelles formes, de nouveaux récits.

La Maison

Grègór Belibi Minya se perd souvent dans un même rêve : celui d’un manoir dont il explore invariablement les pièces jusqu’à la plus étrange, la plus obscure, celle qui suscite en lui une certaine peur. Autrefois, il y avait une vieille dame, une sorcière, qui le poursuivait à travers les couloirs de la demeure, aujourd’hui habitée par une présence indéfinissable, une atmosphère étrange et oppressante qui rappelle les films d’horreur les plus troublants. 

Ce rêve a profondément marqué l’imaginaire de l’artiste, qui a commencé à explorer cette maison en dessin et en peinture à travers différentes séries artistiques. Il descend souvent dans la cave, un lieu qui s’ouvre sur le jardin, symbole de la dualité entre l’obscurité et la lumière, entre le mystère et la révélation : un passage vers l’inconnu, un espace où se cachent les secrets les plus sombres et les plus intimes de l’âme humaine. Selon lui, il existe pour chacun de nous une maison onirique, une maison de souvenir songe, perdu dans l’ombre d’un au-delà du passé vrai.

La Forêt

Le voyage se poursuit dans « La Forêt », où l’eau prend la forme de ruisseaux, rivières et torrents, toujours en mouvement. Dans le doux murmure des feuilles et le balancement des branches, Grègór retrouve les secrets d’une enfance insouciante. La Cité des Terres Blanches, deuxième acte de cette exposition, évoque en lui les souvenirs doux et amers d’un temps révolu. 

L’amitié et l’amour étaient simples comme une partie de foot avec les copains. Mais au milieu de ces instants de bonheur, les premières blessures de l’âme se font sentir, confrontant l’innocence à la dure réalité de la différence et du racisme. Mais au-delà de ces souvenirs, il y a l’arbre. Dans son ombre apaisante, l’artiste a trouvé refuge, a appris à aimer, à rêver et à grandir. La forêt, imprégnée de sacré, résonne de la nature même du désir et de l’union corporelle, où chaque rencontre devient une exploration de l’âme et du corps.