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La colombe de la paix Pablo Picasso

Louise Aleksiejew – La couleur des dinosaures

Du 22 novembre 2024 au 25 mars 2025 – Vernissage jeudi 21 novembre à 19h

Depuis 2005, l’artothèque de Pessac donne chaque année carte blanche à un.e artiste pour une création d’exposition dans son espace, soutenue par la DRAC Nouvelle-Aquitaine et a le plaisir d’accueillir Louise Aleksiejew en 2024.

Louise Aleksiejew s’intéresse à ces moments où la fiction prend le relais de la connaissance. Les traces du temps dont nous disposons pour écrire l’histoire ne sont que parcellaires et deviennent des hypothèses, subjectives et contextuelles.

Ces hypothèses finissent par s’inscrire dans la mémoire collective, troublant les frontières entre ce qui relève du fait avéré ou de la légende urbaine. Invitant à dépasser la binarité du vrai et du faux, le travail de l’artiste, protéiforme, mais toujours provoqué par le dessin, nous plonge dans des récits foisonnants et parfois contradictoires qui articulent nos visions du monde, et nous aident à définir notre place dans l’univers.

Thomas Bernard, « L’héroïne dont vous êtes le livre. »

« Vous venez d’entrer dans l’exposition de Louise Aleksiejew « La couleur des dinosaures » et même si vous mourrez d’envie de découvrir les premières œuvres que vous apercevez au loin devant vous, vous allez lire le premier paragraphe de ce texte :

1. Détective Conan est un manga culte de Aoyama Gôshô dont la publication a commencé en 1994 et qui compte à ce jour 105 tomes. Cette série au long court suit les enquêtes de Shinichi Kudo, fin limier et détective redoutable qui durant une investigation redevient môme suite à l’absorption forcée d’un bien étrange médicament. 

Dorénavant haut comme trois pommes, mais ayant conservé toutes ses facultés de déduction, notre mini-Sherlock prend une nouvelle identité, Conan Edogawa (contraction de Conan Doyle et Ranpo Edogawa, écrivains préférés de l’auteur, et part incognito à la recherche de l’organisation criminelle responsable de son état. 

Malheureusement pour Conan – et heureusement pour nous – il passe des pages et des pages à résoudre toutes les affaires qui se présentent à lui et qui repoussent ad libitum sa quête principale. L’enquête est ici un moteur narratif dont le mangaka use à loisir des stéréotypes, tout en faisant une promesse d’un dénouement total à jamais retardé. 

Notre plaisir de lecture ne se résume pas à la résolution d’une quelconque investigation mais tient dans l’exposé réjouissant d’une méthode de connaissance de soi et du monde dont le but ultime serait de grandir. Ici, les convictions et certitudes sont perpétuellement remises en question par l’accumulation d’indices contradictoires et en compagnie de l’enquêteur nous errons de fausses pistes en cul-de-sac sur les traces d’une vérité ultime que nous n’atteindrons jamais (au bout de 30 ans ça se saurait).

Néanmoins, il apparaît parfois que les doutes permanents fassent place à une certitude éphémère et que le temps d’un album, nos fragiles hypothèses de détective en herbe échafaudées par notre expérience acquise tout au long de l’intrigue, tiennent la route, pour un temps. 

La satisfaction d’une résolution devient alors secondaire, nous savourons surtout le plaisir de l’énigme et la joie de la déduction. L’enquête infinie, qu’elle soit policière, artistique, philosophique ou scientifique n’a pas de conclusion, sa véritable affaire c’est la transformation d’une question en une nouvelle question.

Une fois ce texte fini, vous pouvez vous ruer sur les premières pièces qui s’offrent à vous puis une fois fait, vous rendre à la lecture du paragraphe 2 si vous allez sur votre gauche ou au paragraphe 3 si vous décidez d’aller plus vers la droite. Vous pouvez aussi sauter directement au paragraphe 4 pour connaître la fin du texte ou revenir au paragraphe 1 pour le lire à la personne qui se trouve juste derrière vous et qui a oublié ses lunettes.

2. En 1981, la jeunesse fréquentant une salle d’arcade de la ville de Portland, Oregon, est prise de crises d’insomnie et d’épilepsie, d’hallucinations et d’amnésie. Leur point commun à toutes et à tous est de jouer des heures durant les mains agrippées aux joystick d’une borne portant le nom de Polybius. Selon les témoignages, le jeu a une difficulté jusqu’alors jamais égalée et ses graphismes sont très avance sur son temps. Mettant en danger la santé des joueurs, l’attraction électronique est débranchée et repart chez le fabricant, Sinneslöschen (qui en allemand approximatif veut dire „supression de sens“). 

Entre temps, des hommes vêtus de noir sont venus collecter ses données. Les rumeurs vont bon train ; le jeu serait en fait une machine envoyant des messages subliminaux et servirait à recruter des jeunes personnes dans les rangs de la CIA ou pire, à expérimenter des nouvelles techniques de manipulation mentale. Reste que Polybius disparaît des salles et ne refera son apparition que sous forme de clins d’œil dans la culture populaire comme par exemple dans un épisode des Simpson ou plus récemment dans la série Loki. 

Il fait sa réapparition dans les années 2000 lorsque son nom est évoqué dans un magazine américain dédié à l’histoire du jeu vidéo et que quelques années plus tard, un homme nommé Steven Roach affirme sur le net être un des programmeurs originaux. S’ensuivent sur les forums de longs échanges entre des centaines de personnes affirmant avoir joué au jeu. En 2007, des développeurs indépendants achètent le nom de domaine sinnesloschen.com et proposent Polybius en téléchargement gratuit sur PC. 

Le gameplay du jeu est reconstitué à l’identique et ressemble à un simple jeu de tir en 2D. En 2016, Llamasoft annonce en grande pompe la sortie d’une version revue de Polybius pour Playstation. Son co-créateur, Jeff Minter affirme avoir été autorisé à jouer sur une borne d’arcade Polybius originale dans un entrepôt de Basingstoke, en Angleterre. 

Pour ces deux créations, la stupéfaction est unanime : aucun joueur ni aucune joueuse ne reconnaît le jeu auquel il ou elle aurait joué dans les années 80. La raison est simple : Polybius n’a tout simplement jamais existé. 

Cette histoire nous rappelle que l’existence des choses est facultative pour que leur impact sur notre monde soit réel. Notre réalité n’est au final qu’une intrication de fictions (sociales, politiques, culturelles, etc.) que l’on doit apprendre à démêler pour en nouer de nouvelles.

Regardez à nouveau les œuvres devant vous. Méditez sur elles puis revenez au texte ci-dessus. Si vous ne l’avez pas fait, revenez au paragraphe 1. Si oui, passez au paragraphe 3. Vous pouvez à tout moment aller au paragraphe 4.

3. Quel que soit le sens que vous pensez donner à votre vie, vous pouvez toujours compter sur la vie pour vous le retirer. D’ailleurs, chercher un sens à ce monde, ce foutu labyrinthe dans lequel un mauvais démiurge nous a plongé·e, serait du pur masochisme et le conforterait dans son rôle de tortionnaire.

Ce n’est donc pas un sens qu’il faut trouver à sa vie, mais une issue. Si jamais nous échouons à la trouver, nous pouvons toujours nous réconforter en imaginant qu’une ou un autre reprendra là où nous nous sommes arrêtés·es et finira par trouver la sortie. Il ne sert à rien d’accéder à la locomotive du Transperceneige, il faut descendre de ce train de l’Apocalypse. 

Pour infos, la mort n’est pas une issue, d’ailleurs ce n’est même pas une fin comme l’écrit Agatha Christie dans son seul roman policier qui se passe durant l’Égypte Antique. Pour les égyptiens, en ce temps-là, la mort est un trépas, · un passage vers un ailleurs, une métamorphose inéluctable. De nos jours, nombre croient que changer c’est crever, le contraire des égyptiens en somme. Et c’est souvent à cause de ceux qui se refusent au changement qu’on finira par tous.tes y passer

Les arts au mur artothèque, 2bis, av. Eugène et Marc Dulout 33600 Pessac

Tél :05 56 46 38 41 

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