Abbaye Saint Hilaire

Être Arbre

Les arbres ouvrent le champ de mon imaginaire : symboles du lien entre le ciel et la terre, ils m’invitent à la contemplation et à la verticalité.

Les photographier me permet d’observer la beauté simple du monde, de retrouver sa poésie et de me reconnecter à notre environnement naturel.

Dans un contexte de changements climatiques et de déforestation, ces photographies d’arbres deviennent aussi une forme de lutte.

Écho du Passé, les traces du camp de Rivesaltes 

Je ne sais pas pourquoi mais les lieux chargés de la mémoire collective m’attirent. La photographie m’aide à y entrer et à regarder avec attention.

Il y a 20 ans, j’ai réalisé un reportage sur les camps d’extermination d’Auschwitz Birkenau, le village des martyrs d’Oradour sur glane et les plages de Normandie. Cette série, intitulée “Résonance”, était aboutie et je pensais avoir terminé ce travail de mémoire.

Cependant, à la découverte du camp de Rivesaltes, tout près de chez moi, un besoin puissant et inexplicable de photographier ce lieu s’est réveillé en moi. Tout au long du 20ème siècle et jusqu’en 2007, les baraques du camp ont vu défiler des milliers de personnes – hommes, femmes et enfants – d’origines, de cultures et de nationalités différentes : Républicains espagnols, Juifs, Tsiganes, prisonniers de guerre allemands, Harkis, prisonniers FLN, Guinéens et nord-Vietnamiens. 

Ils y vécurent dans des conditions souvent très dures. Ce lieu témoigne des déplacements forcés, des conflits et des mouvements de décolonisation.

L’empreinte de l’histoire dans le paysage y est forte : j’y vois des plaies et des cicatrices.

La photographie se compose de deux moments distincts : la prise de vue et le tirage en laboratoire. Pour les prises de vue, je me suis rendue plusieurs fois sur le site, m’immergeant dans les différentes lumières qui l’habitent : une lumière dure et écrasante en été, une lumière rasante et parfois diffuse en hiver. 

J’ai ensuite mis de côté les photos avant de commencer le travail de tirage en laboratoire. Le terme “épreuve”, pour désigner le tirage test, a pris tout son sens, comme une étape essentielle pour faire parler la mémoire.

Fanette Bruel

Photographe diplômée de l’Institut Supérieur des Arts de Liège (2003), Fanette Bruel vit et travaille à Bages (Aude). Artisan d’art reconnue, elle allie exigence technique et sensibilité artistique. 

Spécialiste du cyanotype, elle travaille ses tirages sur des papiers soigneusement sélectionnés, cherchant toujours à créer une résonance entre image, support et émotion. Ses œuvres questionnent la mémoire, la nature, le passage du temps et notre lien au monde.