Vernissage de l’exposition précédé d’un dialogue entre l’artiste et Anne Sauvageot, sociologue, auteur du livre L’art et la cécité. Voir et ne pas voir (Éditions La Lettre volée, 2024).

Claude Jeanmart a enseigné en collège, au lycée des Arènes, à l’Université Jean Jaurès. Peintre et plasticien, il pratique et combine aussi bien les techniques de la peinture et du graphisme que celles du numérique et de la vidéo au service de son intérêt pour le corps dansant, en mouvement, corps touché et dessiné en aveugle. 

Depuis une trentaine d’années il s’intéresse à la création littéraire, soutien à sa propre créativité, hors de toute illustration : Franz Kafka, Karel Capek, Casanova, Patricia Runfola, Gérard-Georges Lemaire, Max Guedj. 

Depuis quinze ans, son intérêt pour le corps, sa lecture de Diderot et sa rencontre avec une amie aveugle l’ont amené à explorer un monde nouveau, celui de la création artistique par le toucher seul, sans le recours à la vue. Il a été interviewé parmi d’autres artistes par Anne Sauvageot pour son ouvrage intitulé L’art et la cécité, paru en 2024. 

Pendant toutes ces années, une collaboration s’est nouée et affirmée avec l’artiste catalan Jordi Cerdà. Dans les années 70 et 80, afin d’intéresser collègues, élèves et étudiants à la production des artistes contemporains, Claude Jeamart a consacré, avec son épouse Denise, une partie des vacances d’été à collecter auprès d’une cinquantaine d’artistes entretiens et photo des oeuvres : Soulages, Boltanski, Niki de St Phalle, Henri Cueco, Gérard Fromanger, Vincent Bioules, Annette Messager… Claude Jeanmart a exposé principalement à Paris et Toulouse, en Allemagne, en Catalogne, à Milan, Tokyo, Bogota, Mexico, Miami, …

Claude Jeanmart écrit : à l’origine, il y a l’entrée dans la nuit de Mado. Mado notre amie et voisine, aveugle depuis ses 40 ans et âgée alors de près de 80 ans, nous apprend l’importance du toucher pour les aveugles. À ma question « Comment tu m’imagines ? » elle répond « il faudrait que je te touche ». Mado m’a dessiné, en touchant mon visage d’une main et en le dessinant de l’autre.

De la même manière, elle a dessiné nos corps, Denise et moi, de face, de dos, de profil. Ce fut un dessin surprenant, énergique, débarrassé des stéréotypes de la vraisemblance, mais révélateur de la réalité de nos personnes. La lecture en parallèle du texte de Diderot, Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient, m’a incité à poursuivre cette exploration, série après série, pendant une quinzaine d’années. 

L’important dans cette expérience est de dessiner ce que l’on sent par le toucher et non ce que l’on sait. Et ce faisant, on atteint à une vérité autre que celle donnée par la vue. Pour toutes les séries, les dessins en aveugle, par le toucher du modèle, sur feuilles de papier A4, sont numérisés, projetés par vidéo et agrandis sur des feuilles de polyester. Le personnage composé à partir de ces dessins reçoit ensuite les encres de couleurs choisies en fonction de ma perception des personnes ou de celle des modèles.