Vibeke Mascini, Le Monde est un verbe – Double Vie – Les Objets à vivre – Pollen
Du 28 mars au 28 septembre 2025 – Vernissage Jeudi 27 mars à 19h
Vibeke Mascini, Le Monde est un verbe
Le Capc est heureux de présenter la première exposition institutionnelle d’envergure de Vibeke Mascini, née en 1989 qui vit et travaille à Amsterdam aux Pays-Bas. Intitulée Le Monde est un verbe, cette exposition proposera un dialogue entre des pièces existantes et des nouvelles productions pensées spécifiquement pour le lieu.
Depuis sa formation initiale à la Rietveld Academie puis à la Rijksakademie à Amsterdam, Vibeke Mascini développe une recherche singulière et fascinante, qui s’intéresse au transfert d’énergie et à la manière dont la matière en décomposition peut être transformée en source d’électricité. Souvent réalisées en étroite collaboration avec des scientifiques, des ingénieurs et/ou des musiciens, ses sculptures, installations et vidéos cherchent à canaliser une compréhension intime de l’électricité en établissant une relation directe avec sa source.
Parmi les résultats de ses recherches, la graisse d’une baleine échouée, la cocaïne confisquée par les douanes ou la force hydraulique de l’eau d’un glacier en train de fondre ont été utilisées par l’artiste pour produire de l’électricité dans des installations émouvantes qui livrent une réflexion sur la vie et la mort, et sur les interconnexions souvent contradictoires entre l’homme et les autres formes de vie. De nombreux projets en cours s’intéressent aux sources improbables à partir desquelles l’électricité est générée par ces processus de destruction.
Ses œuvres Salvage (2019) et Instar (2021), se concentrent ainsi sur la récupération d’énergie qui sera ensuite stockée par l’artiste dans des batteries puis réutilisée dans ses œuvres pour donner de nouvelles formes de vie. Cette recherche au long cours menée par l’artiste notamment sur les baleines est centrale dans son approche artistique, à la fois conceptuellement, matériellement et métaphoriquement.
Tout au long de l’histoire humaine, la baleine a en effet été utilisée par l’homme pour divers produits et applications, qu’il s’agisse de graisse pour se chauffer ou pour créer de la lumière. Récemment, des études scientifiques ont trouvé des traces d’industries humaines s’accumulant dans les tissus des baleines, faisant de ces dernières l’un des animaux les plus pollués au monde, le corps de la baleine devenant métaphoriquement une archive toxique de notre rapport au monde.
Parallèlement avec l’œuvre Lethe (2022), Vibeke Mascini explore un processus de démolition qui se déroule à une échelle beaucoup plus vaste, celle de la destruction d’un paysage, en l’occurrence la fonte d’un glacier dans les montagnes suisses, sous l’influence croissante du réchauffement climatique. Le changement climatique a un impact majeur sur les Alpes, la température y a augmenté de deux degrés Celsius au cours du siècle dernier.
ette catastrophe écologique en cours est reconvertie par l’industrie humaine qui crée de l’électricité à partir de cette fonte des glaces. En accord avec la société suisse d’électricité Kraftwerke Zervreila, Vibeke Mascini a obtenu l’accès à l’installation avec laquelle la société produit de l’électricité à partir de l’eau de fonte des glaciers.
Cette eau de fonte s’accumule dans des lacs artificiels créés par l’homme et est acheminée vers des turbines et des générateurs situés en contrebas, qui la convertissent en électricité. Cela transforme une réserve naturelle en un paysage de profit où les conséquences négatives du changement climatique sont converties en production d’électricité.
Dans ses œuvres d’une grande poésie, Vibeke Mascini met ainsi en perspective les évolutions de notre société face aux défis climatiques, et nous plonge au cœur de la quête de nos sociétés contemporaines pour trouver des alternatives viables.
Commissaire Sandra Patron
Double Vie
Double Vie est une exposition pensée avec et autour du film Salt Bath réalisé par les artistes Camille Aleña (1986, Fribourg) et K. Desbouis (1993, Decize) entre 2021 et 2025. À travers ce projet cinématographique, leurs deux pratiques individuelles – qui comprennent l’écriture, la peinture, la performance, la photographie, l’édition, la sculpture et la vidéo – se mêlent.
Tourné au cours de quatre nuits à Prague en République tchèque avec des acteurs et actrices en grande partie amateurs, Salt Bath est construit comme un teen-movie expérimental dont l’atmosphère emprunte aussi bien et sans hiérarchie au genre du thriller qu’au film d’horreur, d’alien, ou à celui de Noël.
Le film nous plonge dans les réflexions à la fois banales mais toujours existentielles de personnages qui sont leurs propres doublures, pris dans une narration non linéaire, en spirale. Le titre du film lui-même – que l’on pourrait traduire par bain de sel – suggère une forme de transition ou de processus de purification épidermique menant à l’irritation. Ces métamorphoses successives se retrouvent au sein de l’exposition qui devient simultanément salle de projection, lieu de teasing, et loges.
Passé l’écran, des œuvres individuelles de Camille Aleña et K. Desbouis se déploient dans l’espace : d’autres vidéos, sous forme de rencontres plus ou moins scénarisées et des sculptures colorées qui prennent la forme de peluches abstraites. Les obsessions communes aux deux artistes se dévoilent : le fétichisme, le fanatisme et le renversement de la relation classique « sujet – objet », mais aussi un attrait prononcé pour des “situation(s)” – qu’elles soient drôles, pathétiques, perverses ou ambivalentes.
Commissaires : Margaux Bonopera et Cédric Fauq
Les Objets à vivre
Un projet imaginé par l’artiste Virginie Barré
Le 27 mars prochain, le Capc inaugure Les Objets à vivre, un projet visant à rendre le musée plus accessible à toutes et tous. Imaginé par l’artiste Virginie Barré, en collaboration avec des personnes en situation de handicap et des étudiants de l’École de Condé, ce projet entend encourager l’expérimentation et le sensible tout en prenant en compte la diversité des personnes qui se rendent au musée.
Installé dans les espaces d’accueil du Capc, le dispositif accessibilité Les Objets à vivre met à la disposition de tous les publics une série d’objets et d’outils d’accompagnement à la rencontre des œuvres spécialement conçus pour répondre aux besoins des personnes en situation de handicap. Parmi ces objets, on trouve des capes sensorielles, des colliers lestés, des lunettes hypersensibles, des boules anti-stress ainsi que des masques apaisants. Ces outils ont été imaginés pour favoriser une expérience sensible, qui respecte et valorise les divers modes de perception, permettant à chacun d’adapter sa visite en fonction de ses besoins spécifiques : réduire l’anxiété, ajuster la perception de l’espace ou moduler l’intensité de l’environnement. Ainsi, Les Objets à vivre offrent une nouvelle façon de visiter le musée, plus inclusive et plus sereine.
Le parti pris central dans la création des Objets à vivre a été de concevoir ces outils avec des personnes en situation de handicap et non pour elles. L’idée est ici de ne pas imposer des solutions extérieures aux besoins spécifiques des individus, mais de les inclure activement dans le processus de création, en leur permettant d’exprimer leurs attentes, leurs désirs et leurs réalités. Cette démarche participative a enrichi le projet, tout en garantissant une adéquation entre les objets et les besoins concrets des utilisateurs.
En particulier, la collaboration avec l’association Tertio, œuvrant pour l’inclusion des personnes en situation de handicap résultant des troubles du spectre de l’Autisme, a été essentielle à l’élaboration du projet. Elle a permis d’introduire la notion d’accessibilité libre des objets. Cette approche prévient la stigmatisation en évitant que les visiteurs n’aient à demander de l’aide ou à signaler leur handicap.
Convaincu de la pertinence de cette proposition, le Capc a fait le choix audacieux de mettre les objets en libre accès dès l’entrée du musée permettant à chaque visiteur de choisir librement les outils qui correspondent à ses envies ou ses besoins, sans avoir à se « déclarer ». Les objets sont simplement là, à disposition de tous les visiteurs, dans un geste d’ouverture, d’égalité et de respect permettant à tous de s’approprier l’espace muséal selon leurs propres modalités de perception et de bien-être.
L’artiste Virginie Barré a également travaillé avec soin sur les matières et les motifs des accessoires. Ces derniers ne se contentent pas d’être fonctionnels ; leur conception vise à susciter des sensations agréables, enrichissant ainsi l’expérience sensorielle et favorisant une interaction plus intime avec l’objet. Grâce à cette approche, Virginie Barré transforme ces objets en véritables œuvres d’art à vivre, créant un dialogue original entre l’art, l’accessibilité et le bien-être.
Pollen
Pollen est le troisième des récits de collection et fait suite au Tour du jour en quatre-vingts mondes ainsi qu’à Amour Systémique. À travers une sélection d’œuvres récentes et historiques, Pollen pense notre rapport à nos environnements – notamment naturels – et à leurs organismes : végétaux, animaux mais aussi minéraux.
L’exposition Pollen se demande si l’expérience de l’art peut aider à mieux regarder notre environnement ou du moins peut permettre de le regarder – et donc de le concevoir – « autrement ». Une question qui se fait d’autant plus importante à l’heure où la multiplicité des discours scientifiques et de la production journalistique et documentaire sur les crises écologiques contemporaines semble avoir des effets limités de prise de conscience collective. Alors, quels modes de récits peuvent changer nos rapports à la nature ? Quelles formes peuvent permettre à la fois de décentrer nos regards sur nos mondes et remettre en jeu nos manières d’exister dans celui-ci ?
Le titre de l’exposition fait référence à l’œuvre Pollen de noisetier (1992) de l’artiste allemand Wolfgang Laib. Cette œuvre, composée de pollen de noisetier, comme son titre l’indique, récolté par l’artiste, a changé de couleur depuis sa première exposition. La présence de cette matière naturelle « pure » au sein des collections pose question quant à son instabilité mais aussi car elle peut encore, potentiellement, attirer des insectes. Si le geste de Wolfgang Laib est empreint d’un grand respect pour la nature voire d’une forme de spiritualité, il pourrait aussi – aux premiers abords – être considéré comme une forme d’extraction.
À partir de ces réflexions, Pollen déploie un parcours d’œuvres de la collection qui rend à la fois compte de la source d’inspiration que représente la nature pour les artistes, mais aussi, et surtout, fait un récit critique de nos rapports à celle-ci. L’extractivisme, la toxicité et la circulation de denrées sont autant de sujets abordés par l’exposition sous des formes aussi diverses que la vidéo, la sculpture, la peinture et l’installation.
Pollen fait spécifiquement la part belle à un grand nombre d’acquisitions récentes de la collection avec des œuvres de Chiara Camoni, Olivia Erlanger, Roy Kohnke, Kapwani Kiwanga, Nina Beier, Sébastien Vonier, Samara Scott, Julien Creuzet, Gina Pane et Lubaina Himid. En plus des œuvres de la collection, Pollen sera également l’occasion de déployer le travail d’artistes qui ont « effleuré » le Capc. Quatre artistes seront ainsi l’objet « d’accrochage dans l’accrochage » au cours des deux ans de l’exposition. Des œuvres de chaque artiste seront montrées pendant six mois, alternativement, pour polliniser les œuvres de la collection. La première étant Emma Reyes.
Avec : Caroline Achaintre, Rosa Barba, Nina Beier, Hicham Berrada, Anna Boghighian, Chiara Camoni, Julien Creuzet, Jesse Darling, Olivia Erlanger, Louis L. Henderson, Lubaina Himid, Kapwani Kiwanga, Roy Köhnke, Wolfgang Laib, Joan Mitchell, Charly Mirambeau, Olivier Mosset, Oscar Murillo, Otobong Nkanga, Masahide Otani, Tony Oursler, Gina Pane, Naufus Ramírez-Figueroa, Emma Reyes, David Ryan, Samara Scott, Jean-Paul Thibeau, Wolfgang Tillmans, Sébastien Vonier
CAPC, Entrepôt Lainé. 7 rue Ferrère, 33000 Bordeaux Tél : 05 56 00 81 50
- Arts Plastiques, Installation
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