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La colombe de la paix Pablo Picasso

Pascal Ravel – Peintures, Dessins

Du 10 avril au 11 mai 2024 – Vernissage mercredi 10 avril 2024 à 18h30

Vernissage en présence de l’artiste, de Marie-Caroline Allaire-Matte, galerie AL/MA et de Pierre Manuel, éditions Méridianes.

Regarder sans ciller

Être là. Invariablement, les peintures de Pascal Ravel occupent l’espace de la matérialité de leur existence autant que leur économie et leur unicité interrogent le regard. Au spectateur à être lui-même là, ainsi que l’écrit Pierre Manuel, et à prendre le temps de voir. 

C’est à cette ascèse et à ce plaisir que nous convierons en mai nos visiteurs à accom­plir une plongée dans l’univers de Pascal Ravel, dans la lumière et dans les matières de ses propositions, dans la perfection nacrée des couches de couleurs jusqu’à révéler de l’une du spectre la plus fragile intimité. Cette obscure clarté, réalisée à travers l’ins­tallation de monolithes monochromes, exposés par séries de trois et de cinq, sera la part spectaculaire de cette exposition dans la galerie de la rue Mirepoix. 

L’artiste nous conviera aussi à découvrir d’autres tra­vaux. Ainsi pourrons-nous découvrir, entre les deux espaces d’exposition, une série de gouaches sur papier au geste ferme, et un ensemble de « papiers gouachés assemblés en damiers », autre versant de l’abstraction sans concession des colonnes ver­ticales déjà évoquées. Enfin, une liberté plus évi­dente du geste de l’artiste sera proposée à travers un ensemble de dessins au motif de l’iris ou du lilas, en reconnaissance à d’illustres prédécesseurs dans l’interrogation incessante de la couleur.

Pascal Ravel est né à Crest en 1965, vit à Paris et travaille à Vitry-sur-Seine.

Ces toiles à la limite du monochrome interrogent le spectateur sur son rapport à la couleur et à l’espace qui l’entoure. Elles ont un effet hypnotique : à chaque nouveau regard l’expérience se modifie grâce à la lumière qui en révèle les subtiles variations chromatiques.

Les tranches de la toile, où les couches de peinture déposées ont laissé une trace, révèlent les nuances colorées qui composent cette unité chromatique. Rien d’illusoire ici pourtant, juste de la matière qui par sa forte présence nous absorbe.

« Le tableau semble ne plus se déployer que sur ces surfaces et sur leur indétermination : à la permanence de la surface colorée se substituent de fortes variations en fonction de la luminosité, parfois jusqu’à sa disparition ; à son unité, la superposition de couches de couleurs très différentes dont les bords gardent témoignage ; et son identité singulière est troublée par la mise en relation des différentes surfaces et donc des couleurs entre elles et avec les espaces blancs des murs.

Comme si cette fois, il ne s’agissait plus de donner au tableau une pleine et entière réalité mais une « profondeur ».

Et donc non plus seulement le voir, mais le voir venir ».

Pierre Manuel

La librairie remercie particulièrement la Galerie AL/MA à Montpellier et les éditions Méridianes pour leur active collaboration

Pascal Ravel – Peintures, Dessins

La peinture de Pascal Ravel s’appréhende sous deux aspects. Le premier se caractérise par la préci­sion des formes : plusieurs rectangles (ici 5, de for­mat 222 x 65 cm) allongés, strictement identiques ; leur scansion dans l’espace grâce à des espace­ments réguliers (pour certains diptyques, si la largeur du mur le permet, ces espacements sont de même largeur que les tableaux) ;

l’apparente uniformité de la surface : pas de figures, pas d’épaisseurs de matière, pas d’impulsions gestuelles pour attirer et attacher l’oeil à des accidents, à des hasards. Rien ne distrait le regard, ne lui propose une rêverie ou une émotion particulières. Une même surface de cou­leur pour chaque tableau – on pourrait évoquer une monochromie – contenue, enserrée, tendue dans et par les limites strictes et aiguisées de la toile. 

Rien qui aille vers le précaire, l’incertain ; ou qui sollicite de l’oeil mobilité et rapidité. Il y a dans cette peinture une dimension de fixité et de solidité monumentales que renforce l’alternance entre les formes en sail­lies des tableaux et les vides – blanc des murs – qui rythme l’espace. Peintures comme des parois plutôt que des miroirs. On peut penser aussi à des pierres dressées, affirmant une présence silencieuse et obs­tinée qui fait face plutôt qu’elle ne provoque un flot d’images intérieures. 

Cette peinture n’est pleine­ment et uniquement que là où elle se tient et nous ne pouvons la déplacer à volonté dans nos mondes intérieurs. Sous cet aspect, toute la réalité de la toile peinte est pensée, voulue, construite et se confond avec ce que nous en voyons. 

Cela pourrait s’appa­renter à de nombreuses démarches contempo­raines (trop rapidement dites abstraites) où le visible relève moins du domaine du sensible ou de l’ima­ginaire c’est-à-dire du signe, que de l’équivalence posée comme absolue entre le tableau et sa réalité physique, son état d’« objet » : les rapports d’espace qui résultent des formats, la tension de la toile, l’unité de la surface. 

Des contre-exemples sont faciles à en déduire : cette peinture ne donne rien d’autre à voir qu’elle, elle ne nous oriente vers aucune signification qui la déborde. Nous ne pouvons pas plus en décou­per telle ou telle partie : des formes sur un fond, des formes entre elles différenciées. L’oeuvre est deve­nue équivalente à sa seule réalité.

L’autre aspect sous lequel se présente cette peinture et qui pourrait contredire le premier se manifeste par la qualité des surfaces colorées si on les aborde de près. Ce n’est plus alors leur qualité d’objet – unité close sur elle-même – qui prévaut, mais une densité mouvante, presque incertaine. 

Le tableau semble ne plus se déployer que sur ces sur­faces et sur leur indétermination : à la permanence de la surface colorée se substituent de fortes varia­tions en fonction de la luminosité, parfois jusqu’à sa disparition ; à son unité, la superposition de couches de couleurs très différentes – jusqu’à quinze pour certains tableaux – dont les bords gardent témoi­gnage ; et son identité singulière est troublée par la mise en relation des différentes surfaces et donc couleurs entre elles et avec les espaces blancs des murs. Comme si cette fois, il ne s’agissait plus de donner au tableau une pleine et entière réalité mais une « profondeur ». 

Et donc non plus seulement le voir mais aussi le voir venir. À la fois par les rela­tions dynamiques entre surfaces colorées ou avec l’espace architectural et par la profondeur tempo­relle qui le constitue et que la lumière révèle. Cette peinture ne s’éclaire pas : elle n’existe que par l’unité ou plutôt le dialogue difficile qu’elle forme avec la lumière. Une unité mouvante, sans cesse différen­ciée et donc sans cesse à re-tenir, à re-garder. C’est-à-dire à apprendre à voir dans la durée qui est la sienne et qui exige que le spectateur se porte vers elle, se laisse prendre lui aussi dans cette épaisseur muable du temps, comme il nous arrive de le faire au spectacle du monde.

Mais cette lumière dont « vit » le tableau ne se définit pas seulement par sa variabilité mais aussi par sa fragilité. À tout moment, elle peut se faire ténèbres, disparaissant à elle-même et engloutissant les jeux de couleurs. Au spectateur alors d’en suppléer la fragilité, d’apporter, par la lenteur de son regard et sa mémoire, ce que ces surfaces ne sont plus en mesure de donner : donc de prendre le temps de voir. 

Donc à être lui-même là, dans le face-à-face avec le tableau. Les « admirables tremblements du temps » dont parle Gaëtan Picon se construisent à la fois de la densité et solidité du tableau et des varia­tions incertaines et instables de la lumière. Comme si cette dualité nommait celle du temps : durée et instants ; immobilité et variations ; jours et nuits. Le temps s’est fait matière de la peinture. Au spectateur, d’en approcher l’abrupte et incertaine présence.

Pierre Manuel

Librairie Ombres Blanches, Galerie & Salle de Conférences, 3 Rue Mirepoix, 31000 Toulouse

Du mardi au vendredi : 14h-19h. Samedi : 10h-13h / 14h/19h

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