Isabelle Souriment – Venus d’ailleurs
Du 19 décembre 2024 au 31 janvier 2025 – Vernissage jeudi 19 décembre à 18h30
Venus d’ailleurs
A la manière des écrivains et des cinéastes de science fiction, Isabelle Souriment suscite une réflexion critique sur le monde actuel en créant des images poétiques et drôles d’un futur imaginaire, où des animaux sauvages de contrées lointaines (Tropiques, pôles…) peuplent des paysages de zones tempérées (France, Danemark, etc.).
Ces manipulations virtuelles que l’artiste fait subir aux images font écho à celles qui sont infligées dans la réalité aux animaux par l’élevage industriel, la recherche génétique, le clonage et qui ont définitivement transformé nos conditions de vie. Ne peut-on avancer l’hypothèse que la nature et l’animal nous questionnent parce que leur statut les situe désormais au plus proche d’un réel que nous transformons, des espèces sauvages que nous réintroduisons dans un milieu surveillé, où le naturel ne peut survivre qu’enclos ?
De ces tableaux émane paradoxalement une ambiance paradisiaque, au sens littéral du terme ; paradis vient du persan par le grec paradeisos, qui signifie « parc clos où se trouvent des animaux sauvages ».
Sa démarche
« Ce travail est une rencontre, un assemblage comme une sorte de « mutation numérique », où je transporte un animal dans un lieu inhabituel donnant libre cours à l’imaginaire. Ne peut-on s’interroger sur la place réelle accordée à l’animal et à son milieu à l’heure actuelle dans une société modifiant et manipulant sans cesse le vivant ? Société qui en vient même à imaginer et créer des espaces protégés, « des enclos devenant huis-clos ».
Mon travail est de cet ordre-là, montage entre artifices, manipulations et sauvegardes. J’ai parfois joué sur la taille, la proportion des animaux par rapport au reste pour donner un côté étrange, ainsi que sur l’ombre qui reste souvent discrète afin de semer un doute sur leur réalité. Ce déplacement « numérique » d’animaux sauvages mutés dans un autre paysage que le leur, questionne ainsi la place de l’animal sauvage dans notre monde en mutation artificielle où le « naturel » ne peut survivre qu’enclos ?
L’intention est de créer par la photographie et son montage, une nature représentée, qui n’est plus originelle, ni indépendante de l’homme ; elle est manipulée, contrôlée, artificiellement intensifiée par la frénésie du monde qui l’entoure. En insérant des animaux dans un paysage inhabituel, je questionne les paradoxes entre l’idée « romantique » de la nature, sa « réalité » et notre « pouvoir » sur celle-ci. »
Isabelle Souriment
« La photographie est mon principal outil, mais il m’arrive aussi d’ajouter des textes, des objets, des sons… Selon les sujets, j’ai une approche documentaire, je souhaite saisir une authenticité mais parfois il m’arrive de construire des mis-en-scènes comme pour mieux en saisir leur sens, ou pour susciter une interrogation, ou permettre une évasion… Voilà le champ qu’il m’intéresse d’atteindre. Non pour raconter des histoires, mais plutôt pour questionner notre relation au monde et à nous-même.
Ce coup d’œil supplémentaire provoqué par un doute sur ce que l’on regarde, peut permettre une autre dimension, celle du questionnement, du positionnement personnel face à un monde en perpétuelle mouvance.
Je cherche parfois que l’image « sorte de son cadre », comme pour mieux saisir sa réalité et son ambiguïté entre le réel et la fiction et son reflet sur notre monde intérieur confronté à l’extérieur.
Mon travail est une réflexion sur l’image impliquant une narration possible mais non systématique. Ma photographie capte une réalité déformée laissant le champ libre à un second regard. Ce rapport ambigu entre le réel et l’imaginaire constitue le socle de mon inspiration afin de saisir l’essentiel, son champ de parole dans un arrêt sur image. »