Trois ans après Peintures entre guillemets à la galerie AL/MA, l’exposition Menus travaux propose un dialogue entre deux aspects du travail actuel d’Agnès Fornells, autour de l’idée d’un inventaire d’objets composant son espace d’atelier : d’une part des céramiques à échelle 1 et d’autre part une série d’images issues d’un procédé photographique rudimentaire et retouché numériquement. Ces deux formes d’empreintes du réel rejouent des situations créées par différentes activités du quotidien allant du travail à la fête.

Lors de ses dernières expositions, l’espace urbain, les rues, en particulier celles de Mexico, étaient évoquées, presque « reconstituées » par la photographie et l’installation d’objets en céramique. Ces prélèvements dans la réalité sont effectués aujourd’hui dans une proximité plus intime, celle de l’appartement/atelier. Ils s’inscrivent dans cette même recherche sur la présence des objets dans un environnement donné, indices de l’occupation habituelle d’un lieu. Un glissement s’est fait entre la rue et l’atelier et, dans l’environnement personnel, certains objets parlent d’un « à côté » du travail, en se mêlant aux outils et ustensiles qui semblent en attente qu’on revienne à l’ouvrage.

En parallèle de l’esthétique précaire et bricolée des pièces réalisées en volume, un autre aspect de la perception des objets est exploré, plus géométrique et abstrait, comme si, en les posant sur un support photosensible, c’était leur ombre qui était capturée. Au moyen de la cyanotypie qui permet de produire, grâce à l’exposition au soleil, des tirages de couleur bleu, Agnès Fornells réalise des photogrammes avec les éléments qui traînent autour d’elle. L’ensemble de ces épreuves pourrait d’ailleurs évoquer un panneau de rangement tels que ceux que l’on trouve au-dessus des établis sur lesquels ont été dessinés les contours de chaque outil.

La série de tirages numériques « inversés » qui en découle met en images un inventaire un peu fantomatique : après quelques étapes numériques, l’ombre de l’objet sujet du tirage photographique se retrouve, en noir et orangé (ou rosé, ou sépia), posé sur un fond en niveau de gris. La matérialité de l’objet est cependant comme reconstituée par celle du papier – par sa texture, par les traces produites par l’application de la solution photosensible, par des poussières ou des éléments parasites attrapés sur la surface lors de l’insolation, par la réaction imprévue que la chimie imprime sur le support, par des altérations subies lors de sa manipulation (plis, froissements etc…). Induisant l’idée de l’usure et de la texture de l’objet, pourtant imperceptible dans la géométrie de son ombre portée.

Menus travaux associe des répliques d’objets en volume, tels des pièges visuels, à leurs ombres portées photographiques, dans un titre qui évoque la mesure discrète des actes du quotidien.

Agnès Fornells vit et travaille à Montpellier.