Alexandre Bagdassarian, La couleur de la Grenade – Caroline Bach
Du 6 octobre au 2 décembre 2023 – 18h – Vernissage jeudi 5 octobre 2023
Alexandre Bagdassarian, La Couleur de la Grenade, Arménie 2022-2023
« La couleur de la grenade », est un travail de photographie documentaire au long cours hanté par une question : y a-t-il un demain au demain ? Une dérive guidée par le regard vibrant d’une jeunesse née dans les décombres de l’Arménie, héritière d’une Histoire dont la complexité et la violence insondable continue de résonner aujourd’hui. Au coeur de ce rêve bien réel, vers où regarder ? l’Occident, l’Orient, la Russie ? Au milieu des paysages fragmentés, des personnes séparées, vers où naviguer ? Vers une île sans côtes, où se créent toujours les liens qui unissent, les regards qui illuminent, les montagnes qui grandissent.
À travers les cicatrices des territoires, j’ai aussi entrevu un invisible : d’un conflit sans témoin, d’un pays face à ses voisins mais aussi face à lui-même et son propre regard.
L’indépendance et la fin de l’URSS 30 ans plus tôt ont laissé un grand vide économique et humain. Les amis sont devenus des ennemis, les Azerbaïdjanais furent chassés d’Arménie et les Arméniens chassés d’Azerbaïdjan. La première guerre pour l’enclave du Haut-Karabakh (1988- 1994) et le dessin approximatif des frontières n’ont jamais vraiment été surmontés et résolus. Pour les deux côtés, des plaies ouvertes. Le 27 septembre 2020 le conflit resurgit et la deuxième guerre pour le Haut-Karabakh commence. Depuis, la paix est officiellement revenue, mais elle est friable et toujours plus fragile. Les coups de feu, presque chaque nuit le long des frontières, laissent présager une inévitable confrontation future. Dans les campagnes le travail est rare, et pour beaucoup d’Arméniens la seule issue est le départ en Russie quelques mois par an pour des emplois dans l’industrie ou l’agriculture principalement.
Cette Russie, si présente par la langue, l’architecture et une omniprésence militaire dans le pays (Le long de la frontière avec l’Iran, avec la Turquie au nord-est et dernièrement, les « gardiens de la paix » Russe pour le Haut-Karabakh et les frontières Arméniennes avec l’Azerbaïdjan).
Inexorablement la démographie chute et beaucoup de jeunes essayent de partir vers l’ouest, idéalisant la diaspora qui incarne un univers stable et le rêve d’un recommencement. Malgré quelques mouvements sociaux, culturels et féministes, ces dernières années (Révolution de velours, 2018), la contestation contre la mauvaise gestion sociale et économique du pays semble s’essouffler. D’un côté l’exhibition des richesses de la nouvelle élite, et de l’autre la difficulté à parler de la pauvreté, hantent les arméniens et produisent d’importantes atteintes psychologiques dans une société particulièrement attachée à la dignité humaine.
Plus personnellement, c’est aussi un éveil inconscient, somnambule, d’un sentiment d’appartenance à cette culture, pour laquelle, malgré mon nom, j’ignorai presque tout. Quelques souvenirs d’enfance comme un mélange d’odeurs, d’épices, de visages, et aujourd’hui l’envie de remonter la piste de mes ancêtres et de leurs histoire. De leurs Cilicie natale (province sud de l’ Anatolie), puis partis travailler dans le textile des quartiers arméniens de Bursa dans la province de Constantinople, jusqu’aux événements de 1915 qui les conduisirent d’abord vers le Liban avant de rejoindre la France. Aujourd’hui, j’ai seulement un nom et une adresse posée sur une enveloppe et destinés à mon grand-père. Cette rue, et ce numéro, d’Erevan ont été le point de départ de mon projet.
Le titre «la couleur de la grenade» est en partie un clin d’oeil au poète Sayat Nova qui de son temps écrivait dans toutes les langues du Caucase, Russe, Arménien, géorgien et Azerbaïdjannais, tel un pont entre les peuples et une ode à la singulière universelle.
La grenade, symbole doux et âpre, est un fruit très présent dans la société et la culture Arménienne. Ils l’appellent «Fruit du paradis» et leurs légendes disent que regorgent en son coeur 365 pépins, un pour chaque journée de l’année, comme symbole d’éternité.
Alexandre Bagdassarian
Caroline Bach Givors, au confluent du Gier et du Rhône 2020-2021
En 2020, à la recherche d’un projet ancré dans le territoire, capable de révéler la beauté et les blessures de la ville de Givors, André Vincent et Alexandra Le Moëne, alors aux affaires culturelles de la ville de Givors, m’ont proposé, à la suite des séries sur Bataville, d’explorer la cité givordine.
J’ai choisi de faire un récit photographique ayant la forme d’une ouverture, de pistes à suivre… en posant comme présupposé : je suis de passage, je n’habite pas Givors, je traverse Givors.
Pour élaborer ce récit avec la photographie, je me suis appuyée sur une circulation spiralaire de l’espace : du plus lointain au plus proche ; de l’extérieur vers l’intérieur ; du plus visible au moins visible.
J’ai ainsi organisé l’espace givordin à partir d’ilots d’images qui fonctionnent comme des repères. On peut les relier pour tracer une sorte de carte de Givors. L’ouvrage « Givors, au confluent du Gier et du Rhône » reproduit cette organisation.
Organisé avec l ’association La Cabane, l’espace de l’exposition accueillera aussi un débat-performance, La Disputatio #2, sur le thème : « Un territoire peut-il se périmer… comme un produit ? ».
La Disputatio #1 sera diffusée pendant l’exposition.
Caroline Bach.
Le bleu du ciel, 12, rue des fantasques 69001 Lyon : T +33 (0)4 72 07 84 31
ouvert du mercredi au samedi de 14h00 à 18h00 et sur rendez-vous pour les groupes
- Photographie
- | Publié le