Zoé ARNAUD, Mali ARUN, Robert CAHEN, Clément PHILIPPE, Gwenola WAGON + Info Quidérange …

« On n’a pas encore mesuré complètement, sans doute, le bouleversement qu’introduit dans notre rapport à la nature la conscience toute nouvelle de sa disparition possible, et l’idée que la mort, qui était jusque-là le fait des créatures au sein d’une totalité indifférente et pérenne, puisse désormais menacer cette totalité même. 

Les deux modalités possibles de cette disparition, celle de la destruction lente ou celle de l’Apocalypse, hantent maintenant les esprits. » Colette Garraud, L’idée de nature dans l’art contemporain, Flammarion, 1994.

Cette exposition présente des oeuvres qui exaltent la beauté fragile de la nature jusque dans ses confins et montre combien les menaces de tous ordres qui l’assaillent sont présents à l’esprit des artistes d’aujourd’hui.
Récit dystopique, regard élégiaque, référence à l’Apocalypse, mais aussi stratégie d’évitement extravagant ou obsessionnel, la fin du monde arrive ?…

Chronique du soleil noir, vidéo (2024,17’), Gwenola WAGON (1975, F.), prêt de l’artiste.
Née d’une collaboration avec l’Observatoire de Paris, avec le soutien du Hangard Y, cette vidéo fait le récit, à la manière d’un roman photo saturé de couleurs et d’affects, d’un monde en survie artificielle après la troisième guerre mondiale et la disparition du soleil.

Paradisus, vidéo (2016, 8’), Mali ARUN (1987, F.), prêt du Grec.
En filmant l’afflux progressif des touristes dans le parc naturel croate des lacs de Plitvice, Mali Arun reprend le récit biblique de la Création à l’Apocalypse. Adam et Eve en prosaïques baigneurs dans une nature sublime ne seront pas seuls longtemps, vite submergés par l’arrivée d’innombrables promeneurs photographes qui vont transformer le Paradis en enfer.

Le cercle, vidéo (2005,13’), Robert CAHEN (1945, Valence, F.), prêt du Frac Alsace.
Le Svalbard, archipel en mer de Groenland, est menacé par le réchauffement climatique et les exploitations minière et pétrolière; En 2008, la Réserve mondiale de semences y a été installée (sur l’ile du Spitzberg). Les fondus enchainés tremblés et délicats de cette vidéo silencieuse et lumineuse expriment la conscience de l’impermanence des choses et des lieux, aussi beaux soient-ils.

Myco-Xerion, installation, (2019) Clément PHILIPPE (Annecy, F.)

Les fils électriques sont plongés dans du sulfate de cuivre; Celui ci contamine le mur comme un lichen minéral.

Les failles, la corrosion, l’accident nucléaire : les oeuvres de Clément Philippe sont traversées par le concept d’entropie qui mesure le degré de chaos d’un système. Dessins au fil de fer rouillé, vidéo de fissures dans le sol, anciens pots à soufre témoignent d’une « époque qui se consomme et se consume aux rythmes des évolutions et des catastrophes induites par l’homme » (Mathilde Nourrisson-Moncey)

Carte postale, Zoé ARNAUD,(1999, Die, F.)

« L’avenir s’assombrit, il faut transgresser les règles pour survivre » Où vivre si les océans submergent la terre ? avec les flamands aux hautes pattes et aux ailes roses qui peuplent les étangs et côtoient les nains de jardins autour de Narbonne. Zoé pratique l’humour parodique et le mauvais goût hors norme, peut être pour surmonter la désillusion de sa génération devant la catastrophe annoncée.

La bombe nucléaire- images déclassifiiées (2017) montage par Atom central pour l’IRNC (Institut de recherche sur la résolution non violente des conflits) et Info Quidérange

L’hallucinante succession d’explosions nucléaires renvoie à l’affirmation de Günther Anders : « Nous ne vivons pas dans une époque mais dans un délai. C’est aujourd’hui que les termes fin du monde, Apocalypse prennent un sens sérieux et non métaphysique. Depuis l’année zéro (1945) ils désignent pour la première fois une fin réellement possible » (La menace nucléaire. Considérations radicales sur l’âge atomique)