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Gabriele Basilico « Retours à Beyrouth »

Gabriele Basilico « Retours à Beyrouth » & Francesco Jodice « West »

Du 1er février au 14 mai 2023 – Vernissage mardi 31 janvier à 18h

Gabriele Basilico « Retours à Beyrouth »

« À la photographie, parallèlement au témoignage de la folie des hommes, était confié un devoir citoyen, celui de contribuer à la construction de la mémoire d’une page d’histoire ».
G.Basilico

Le photographe italien Gabriele Basilico (1944-2013) est considéré comme l’un des plus importants photographes documentaristes. Durant près de quarante ans, il a posé son regard sur les villes du monde entier et a développé une réflexion sur la photographie de paysage. L’exposition « Retours à Beyrouth », qui présente pour la première fois les quatre missions photographiques effectuées en 1991, en 2003, en 2008 et 2011, documente la reconstruction progressive de la ville et témoigne de la grande affection du photographe envers la capitale libanaise.

En 1991, à l’initiative de l’écrivaine libanaise Dominique Eddé, la Fondation Hariri finança une campagne documentaire sur le centre-ville de Beyrouth, alors quasiment détruit après quinze années de guerre civile. Y participèrent, en toute liberté, Gabriele Basilico, René Burri, Raymond Depardon, Fouad Elkoury, Robert Frank et Josef Koudelka. S’en suivirent un livre et une exposition qui ont fait date.

Gabriele Basilico aimait les projets clairs, structurés, clos, et ne revenait guère sur ses pas. Beyrouth a été pour lui une exception notable puisqu’il s’y est rendu à quatre reprises, qu’il y a photographié en noir et blanc et en couleurs, et qu’il y a même exposé une partie de son enquête photographique. Il avait le projet de publier un ouvrage regroupant l’ensemble de ses quatre voyages, mais il n’en eut pas le temps.

C’est donc la première fois que ce travail est montré dans son extension et que, à cette occasion, les éditions Contrasto publient l’ouvrage de référence. On retrouve dans cette enquête visuelle qui s’est développée sur vingt ans l’approche caractéristique et rigoureuse de l’ancien étudiant en architecture. Une réflexion permanente sur le sens de la frontalité et des angles de prise de vue, une volonté de décrypter l’espace urbain et de le rendre lisible.

Gabriele Basilico n’était pas un photographe de guerre et il ne sut, d’abord, comment aborder la destruction du centre de la capitale libanaise. Après le constat et la confrontation directe à la ruine, il décida de suivre le processus de reconstruction. Une forme d’optimisme.

Christian Caujolle, conseiller artistique

Photographier Beyrouth

En 1991, je suis arrivé à Beyrouth pour photographier la partie centrale de la ville affectée par la longue guerre civile qui avait commencé quinze ans plus tôt (1975).

Il ne s’agissait pas de faire un reportage sur les ruines, mais de composer un « état des choses » confié à une interprétation libre et personnelle.

Je photographie les villes depuis de nombreuses années, je me suis familiarisé avec la ritualité des gestes d’exploration du tissu urbain. Mais une ville blessée outragée, nécessite une sensibilité particulière, exige une attention spéciale, une participation mais aussi du respect.

Il y a d’abord l’émotion et la douleur de la tragédie, puis la peur et l’hésitation qui précèdent le début de la pratique rituelle de la photographie qui exige considération et responsabilité.

Puis quelque chose se passe. Peut-être que la ville écoute, sent l’hésitation, envoie un message et libère calmement l’angoisse, aide à détendre le regard pétrifié. Un silence métaphysique s’installe, une pause après laquelle on peut agir, observer, prendre des mesures nécessaires.
Par la suite, je suis retourné à Beyrouth trois autres fois pour suivre la reconstruction du centre-ville, qui semble aujourd’hui ressuscité par magie dans la nouvelle ligne d’horizon urbaine.

Lorsque j’en ai la possibilité, je retourne plusieurs fois sur les lieux que j’ai photographiés. Pour moi, c’est le moyen le plus intéressant et le plus utile d’avoir une relation concrète, d’être plus impliqué dans la réalité. La pratique du retour crée une disposition sentimentale singulière : comme l’attente d’un rendez-vous souhaité, un réveil de la mémoire pour des lieux, des objets, des personnes, comme si on ranimait le moteur d’une voiture immobilisée depuis longtemps.

Pour Beyrouth, c’était encore plus. Plusieurs années s’étaient écoulées et pourtant, à chaque fois, c’était comme si je revenais après un temps immémorial, un temps hors du temps qui contient un peu de l’histoire du monde, la mémoire d’un monde coulé dans la réalité physique d’un lieu.

Le paysage urbain actuel perturbe radicalement l’iconographie compacte et cohérente du vieux Beyrouth. Aujourd’hui, bien que le tissu de la zone centrale respecte parfaitement la topographie ancienne et que les bâtiments historiques du passé sont presque tous fidèlement reconstruits avec des modifications pratiquement invisibles par rapport aux originaux, de grandes zones vides persistent entre cette nouvelle « citadelle » et la mer.

Dans cette vaste zone, cependant, un nouveau Beyrouth s’élève à un rythme tourbillonnant, qui sera inévitablement différent, dont la force explosive est clairement identifié parmi les nombreux bâtiments flambants neufs inspirés par un style néo-rationaliste, rayonnant autour des deux grands nouveaux monuments urbains : la mosquée Mohammad Al-Amin sur la place des Martyrs et le Souk central de Rafael Moneo.
Commentaires de Gabriele Basilico lors de sa mission à Beyrouth en mars 2012

Texte extrait du livre « Gabriele Basilico Ritorni a Beirut »

Francesco Jodice « West »

1er fév. – 2 avril 2023 – 2de Galerie

WEST est un projet de recherche qui raconte l’essor et le déclin du siècle américain, en enquêtant sur les origines de la crise actuelle du modèle libéral et, plus généralement, de l’Occident dans un arc compris entre le début de la ruée vers l’or (1848) et la faillite de Lehman Brothers (2008). Commencé en 2014, WEST consiste en trois longs voyages à travers certains des États où la ruée vers l’or a eu lieu : Californie, Nevada, Utah, Wyoming, Arizona, Colorado, Nouveau-Mexique, Nebraska, Texas, avec l’inclusion de zones contiguës mexicaines.

Le point central de l’ensemble de l’oeuvre se trouve au carrefour entre la géologie particulière de cette région (l’une des plus anciennes structures géologiques de la planète) et les ruines archéologiques (mines, villes fantômes, utopies, complexes et infrastructures abandonnées) de cette saison animée par une quête irrépressible de richesses immédiates.

Réalisé avec le soutien du Ministère de la Culture italien, WEST a été sélectionné parmi les lauréats de la Xème édition de l’Italian Council (2021) un programme de promotion internationale de l’art italien de la Direction générale de la créativité contemporaine du ministère de la Culture.

Le projet est présenté par le Musée de la photographie contemporaine de Milan Cinisello (MUFOCO).
avec la Galerie le Château d’Eau, en collaboration avec le centre d’architecture Arc en rêve de Bordeaux.

 

Beaucoup de photographes européens sont partis pour les États-Unis avec en tête des lectures, pas toujours justes mais la plupart du temps nostalgiques, des Américains de Robert Frank. Et l’on ne compte plus les road movies subjectifs voire sentimentaux, carnets de notes fascinés par les grands espaces, les petites villes, les motels perdus au bout du monde et les maisons en bois venues d’un autre siècle.

L’approche de Francesco Jodice est à l’opposé de tout cela. Elle ne considère pas la photographie comme porteuse des souvenirs d’une expérience intime mais comme outil au service d’une analyse. Cette dernière se déroule selon un parcours méticuleusement établi qui se fonde sur des données historiques et va permettre de lire, sur une durée de 160 années l’évolution et le déclin de la plus grande puissance mondiale. Cette durée temporelle est celle qui sépare le début de la ruée vers l’or en 1848 de la faillite spectaculaire de la banque Lehman Brothers en 2008 qui affecta tout le système bancaire américain, et au-delà mondial.

Francesco Jodice photographie et met en évidence un des éléments oubliés de ce qui a fait la puissance des États-Unis : une iconographie, ou plus justement un mélange d’iconographies qui associent et combinent le paysage naturel et Hollywood à la conquête de l’espace, entre autres, et fondent des mythologies et un pouvoir. Mais aujourd’hui le paysage américain dit une faillite et est jonché de ruines. Alors que nous sommes toujours au pays de l’argent roi.

Christian Caujolle

Galerie Le Château d’Eau 1, Place Laganne 31300 Toulouse. Tél. 05 34 24 52 35

Du mardi au dimanche de 13h à 19h

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