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John Armleder « Yakety Yak » –

Du 15 avril au 24 septembre 2023 – Vernissage Samedi 15 avril – 18h30

John Armleder « Yakety Yak »

Peintre, performer, curateur, collectionneur, éditeur, galeriste, John Armleder (1948, Genève) est une figure majeure de l’art contemporain. Son œuvre est littéralement polymorphe : elle n’est pas identifiable à un médium, une procédure, un style ou un univers esthétique. Son travail se déploie sous de multiples apparences, se répète ou se métamorphose, sans jamais se développer autrement qu’au gré des circonstances.

Le titre de cette exposition « Yakety Yak renvoie à l’idée souvent exprimée par John Armleder selon laquelle les œuvres d’art n’ont pas besoin des artistes dans la mesure où l’art résulte d’un ensemble de circonstances historiques, économiques et sociales. Ce sont ces circonstances qui « créent », sous couvert, en somme, des artistes. Face à la méfiance et à l’anxiété du moment, John Armleder propose avec humour (toujours !) un grand « bla bla bla » au Musée régional d’art contemporain Occitanie à Sérignan, nous invitant à partager nos émotions communes et des échanges de regard.

Les débuts en art de John Armleder (John Michael Armleder, dit) s’effectuent sous le signe du collectif. En 1969, il constitue à Genève, aux côtés de Patrick Lucchini et Claude Rychner, le groupe Ecart, qui développe ses activités dans un local tenant lieu à la fois de galerie, de librairie et de maison d’édition. John Armleder y accueille notamment le visiteur avec une tasse de thé, l’invitant à une discussion sur l’esthétique. Durant les années 70, la pratique performative de l’artiste est ainsi marquée par l’esprit néo-dada de Fluxus, qui cherchait à annuler les frontières entre l’art et la vie.

Au début des années 80, John Armleder s’inscrit dans le mouvement de la post-modernité et revendique un engagement politique et social. Il utilise l’objet comme ready-made qu’il juxtapose avec les toiles abstraites. Cette série intitulée Furnitures Sculptures et dont une nouvelle pièce sera présentée dans l’exposition, sont des œuvres hybrides associant peinture et mobilier (bancs Jean Prouvé, sofas Ublad Klug et Ueli Berger, lit Superstudio…) et témoignant d’une totale rupture avec le grand récit moderniste de l’autonomie de l’œuvre d’art.

John Armleder manipule, sans souci de hiérarchie, tableaux abstraits, planches de surf, assiettes blanches, sapins de Noël, tubes néons ou boules à facettes, le tout se côtoyant selon un principe d’équivalence généralisée. L’objet utilitaire est élevé au rang de sculpture, moins dans une logique de transgression que de mise à mal de la valeur artistique. Depuis 15 ans, John Armleder ressaisit l’exposition comme médium à part entière et joue sur la saturation de l’espace, l’effondrement des genres et un glissement entre l’art et le décoratif.

Tour à tour associé au mouvement Néo Géo, à l’appropriationnisme ou à la Commodity Sculpture, le travail de John Armleder échappe cependant à toute tentative de classification en convoquant un vocabulaire plastique hétérogène, qui semble souligner l’inévitable réification de l’art, la fatalité de procéder à son propre pastiche. Dans le grand brassage stylistique qui caractérise son œuvre, la peinture abstraite tient une place essentielle. Il se réapproprie le vocabulaire classique de l’abstraction, ses bandes, cercles ou coulures. Pour l’exposition, l’artiste genevois a produit trois nouvelles peintures dont une Puddle Painting (peintures en flaques) de 10 m de long et une nouvelle coulée de 6 m de long. Réalisées par déversement de matériaux hétérogènes à même la toile (peinture acrylique, vernis, liquides pour surfaces extérieures, mais également poudres, confettis, paillettes et petits objets décoratifs), ces peintures sont élaborées selon un mode doublement aléatoire : leur dépôt sur la surface à peindre n’est pas contrôlé par un geste de maîtrise artistique et leur mélange provoque un changement chimique de leurs propriétés originelles, tant sur le plan chromatique que physique. Cette technique picturale, permet à l’artiste de programmer une perte de contrôle, de déclencher des accidents et des éruptions inattendues, bref de combiner le « lâcher prise » cher à John Cage avec « une forme d’expressivité sans subjectivité ».

On l’aura compris, l’exposition Yakety Yak consacrée à John Armleder au Mrac à Sérignan est inclassable et généreuse comme l’artiste, élégante comme le dandy qu’il est, piquante comme cet « Apache » genevois et riche d’émotions comme ce somnambule pince-sans-rire. Ici plus besoin de parler pour ne rien dire, seulement se laisser porter par le regard et la musique du youkoulélé que l’artiste affectionne tant.

Commissariat : Clément Nouet

Mrzyk & Moriceau « Meilleurs Vœux de la Jamaïque »

Que s’est-il réellement passé pendant cette résidence en Jamaïque ? Le couple d’artistes Mrzyk & Moriceau reste très vague sur les six mois vécus dans cet état insulaire des Caraïbes, même si de leur propre aveu, ils ne sont pas rentrés indemnes de cette aventure. Beaucoup de rumeurs courent.

L’exposition immersive Meilleurs Vœux de la Jamaïque est le fruit de cette résidence, qui suggère de nombreuses histoires.
La première serait la rencontre d’un Taximan à l’aéroport de Kingston, homme très élégant aux mocassins violets avec lequel ils vont très vite sympathiser. Il leur confiera être aussi chamane et avoir la capacité de voir le futur dans la sauce du « poulet Jerk ».
Évidemment, nos deux artistes, avides d’en savoir plus sur leur carrière, donnèrent un billet à ce chamane tombé du ciel qui leur révèlera une chose incroyable : ils allaient délaisser le crayon pour dessiner à la scie sauteuse. Grâce à un second billet, ils saisirent un peu mieux le sens de cette phrase : il leur faudrait créer une composition de murs légers, un long serpent de paravents composé de dessins découpés. Un serpent à deux faces, l’une composée comme un marabout de motifs étranges et l’autre noire, tout en silhouettes inquiétantes.
Dès le lendemain ils achetèrent une scie sauteuse.

Au fil de leur séjour, Mrzyk & Moriceau découvrirent que beaucoup de Jamaïcains, en échange de quelques billets, avaient des dons de voyances avec des procédés toujours différents.
C’est ainsi qu’une vieille dame sans âge leur révéla, en observant méticuleusement leurs ourlets, qu’une graine magique était cachée dans une télécommande d’occasion sur le marché aux puces d’Annotto Bay. Elle leur conseilla de trouver cette graine.
Un loueur de ska vit à travers une bulle de chewing-gum un périple dans un lotissement où les enfants jouent sous terre : un lotissement de mégots.
Ou encore, en regardant l’ombre de son hutia, un petit garçon les alerta sur le risque d’une plongée sous-marine fatale mettant en cause des mocassins-palmes défectueux, il fallait éviter à tout prix de chausser ce type de modèle pendant leur séjour.
Une bande de moules eut aussi une vision en échange de quelques cigarettes : prudence, les artistes devaient faire très attention sur le choix des épingles qu’ils utiliseraient pour accrocher leurs dessins. Certaines étaient ensorcelées et pouvaient contaminer le papier. En conséquence, ces moules leur conseillèrent d’utiliser de la Patafix jamaïcaine, sorte de pâte à galette multi-usage très utile.
La vue en coupe d’un poil de QR code raconta aussi beaucoup de choses sur le futur de notre couple d’artistes. Il fallait absolument réhausser le plafond, les paravents poussaient. Les prédictions devenaient de plus en plus étranges…

En plus de ces visions jamaïcaines, Mrzyk & Moriceau dormaient très mal. La nuit, des effets d’échelles, de matière, de superposition et de perspectives sauvages furetaient autour de leur maison en essayant de rentrer. Le couple devait constamment rester vigilant. Et puis toujours cette sensation étrange d’être observé par un canard.

L’abus de produits locaux les aidèrent à mieux comprendre la signification de ces présages et de ces événements. Dans une grotte tapissée de mousses phosphorescentes composées de 15G naturelle, la rencontre avec un lombric fut décisive dans la suite des événements. Celui-ci leur conseilla de se protéger du mauvais oeil en enfilant plusieurs chaussettes aux motifs bigarrés. C’est ce que firent Mrzyk & Moriceau. Ils avaient maintenant très chaud aux pieds mais se trouvaient à l’abri du monde réel. Curieusement les prédictions des Jamaïcains déclinaient en même temps que la bourse de la résidence, les artistes étaient à sec et les Jamaïcains ne voyaient plus rien dans le futur. Ils commencèrent à douter de la véracité de toutes ces visions.
Tout devenait cohérent. Ils allaient raconter la création de l’univers dans un dessin animé.

Commissariat : Clément Nouet

MRAC, 146, avenue de la plage – 34 410 Sérignan. Tél : 04 67 32 33 05

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