Exposition en partenariat avec le Festival de Musique Cordes sur Ciel – Méditerranée, musiques des deux rives

Une rencontre avec l’artiste sera proposée au musée, le vendredi 21 juillet à 18h30 à l’occasion de la journée d’ouverture du Festival de Musique Cordes sur Ciel.

Peintre autodidacte, artiste des deux rives, artistes d’entre deux rives, Habib Hasnaoui traverse en funambule la méditerranée au fil d’une vie le renvoyant sans cesse d’une rive à l’autre.

Né en Algérie, il grandit en France. Puis, retour en terre natale, où il est happé par les troubles qui soulèvent le pays dans les années 1990.

De cette période, de ces épreuves, lui reste une conscience exacerbée des douleurs du monde, une hypersensibilité aux souffrances qui l’entourent, et des saignées dans le cœur, des saignées dans le cerveau, des saignées sur la toile.

Au début des années 2000, Habib Hasnaoui refait la traversée dans l’autre sens et retrouve les gestes du peintre. D’abord assembleur de journaux, de papiers et d’affiches qu’il coupe, déchire et froisse dans ses collages. Ensuite, tout en gardant beaucoup de matière et le papier en filigrane derrière la couleur, viennent les quais et les ports. Alger-Marseille-Oran. Et cette combinaison à l’infini renouvelée.

En écho à cette question de l’appartenance, Habib Hasnaoui griffonne ses œuvres d’une écriture automatique sibylline. Talisman mystérieux et incompréhensible, il exorciste sa frustration de ne pas maîtriser l’écriture arabe. Il écrit une histoire qui n’est que traces, signes et intuitions, comme un hommage à sa mère, à la perplexité de sa mère analphabète face à la lettre, au mot et à la vie qui les anime.

La peinture de Habib Hasnaoui est revendicative, l’artiste vit son siècle, il en ressent les moindres soubresauts, les moindres spasmes et chacun laisse en lui une fêlure. Il n’est pas dans une quête narcissique et esthétique, le monde le traverse et jaillit en peinture. Loin d’une complaisance contemplation de ce qui l’entoure, le processus créateur chez cet artiste s’abreuve d’une perpétuelle confrontation au monde.

Dans l’oppressante densité du monde urbain, où les stimuli sont tellement nombreux que les hommes se jouxtent sans même s’apercevoir, se croisent sans jamais se toucher, se sentir, s’entendre et encore moins se comprendre, m’art expressionniste de Habib Hasnaoui est une poche de résistance contre cette perte de sens, du sens de l’Autre.

Résistance contre l’oubli de la substantialité humaine, de l’être, de la présence.

Texte : Amina Far, historienne de l’Art