Je travaille depuis plusieurs années sur l’étude de végétaux en état de fanaison, cet ensemble de dessins constitue « Les anatomies botaniques ». Ce n’est pas la représentation naturaliste de la plante qui en est le moteur, mais l’exploration de l’inépuisable immense dans le détail et les territoires indéfinis que cela génère, de l’organe au paysage.

La nouvelle série de dessins présentée a pour essentiel objet l’arum fané, elle s’intitule  «Les effets désirables».

Positivement hantée par les images de la Serpentine Dance de Loïe Fuller, soeur jumelle d’un arum, je me penche pour une observation longue et aiguë de ces fleurs que je collectionne.

A la perfection froide, figée et blanche de l’épanouissement succèdent le mouvement, les reliefs, la complexité des lignes dans la fanaison. L’arum n’est jamais autant en vie que dans sa mort.

L’unique spathe oublie sa sévérité de vivant, s’élève, se retourne, tournoie, ondoie, ondule en mourant _ effet miroir avec Loïe.

Ce n’est plus un pétale, c’est une vague, c’est une danse.

Les volumes naissants avec la fanaison offrent un vertigineux changement d’échelle, vallons,  cordons dunaires, gorges, cascades, gouffres.

Dessiner ces arums en déshydratation, c’est traverser tous les mondes, tous les territoires, il n’y a pas d’altérité radicale entre l’organe, la roche, la peau, le pétale.

Pour cheminer entre toutes ces visions, j’utilise l’encre et le graphite sur carton et parce que frôler la mise en abyme était tentant, des voiles de Loie Fuller évoquant l’arum, le dessin à la mine de plomb bascule sur la toile-drap-suaire.

«Face au monde végétal, je me sens du même bord. Et très rassurée de l’être».

(Détournement de la phrase de Claudie Hunzinger à propos du monde animal)