« Where two rivers meet » a vu le jour lors d’une résidence à la galerie permettant à l’artiste d’explorer son processus créatif de manière inédite, à la confluence, au croisement du Rhône et de la Saône dans un échange intime et maitrisé avec les eaux. Cette exposition met en scène, une chorégraphie à mi-chemin entre ordre et chaos qui nous invite à repenser nos échanges et notre connectivité avec notre environnement.

Lorsque j’ai collaboré pour la première fois avec Jo Lewis, dans le cadre de la toute première session du cabinet de curiosités de la galerie Valérie Eymeric, nous exposions sa série « breath ». Cette série sur le souffle fût pour moi la première entrée dans le travail de l’artiste et bien qu’éloignée de son travail habituel, cette série définissait pourtant les concepts de sa pratique et de sa vision.

Pour l’exposition « Where two rivers meet » c’est en quelque sorte un retour à sa pratique habituelle que nous proposons cette fois.

C’est à la confluence, au croisement du Rhône et de la Saône, loin de ses habitudes et de son atelier, que Jo Lewis a réalisé cette série inédite, pleine de subtilité, pleine de vie.

Cette nouvelle série toute en délicatesse dévoile une vulnérabilité absente des séries précédentes et marque tout particulièrement la tension de cette rencontre. -Une rencontre oui, c’est bien de cela dont il s’agit.-

Les oeuvres de Jo Lewis sont le fruit d’une chorégraphie dont le processus est minutieusement préparé puis cédé à la fortuité. Jo Lewis devient alors en ces instants chorégraphe du hasard qui, par ces rencontres avec les eaux provoque le moment sérendipien.

Une fois immergé dans l’eau, le papier capte l’instant, il grave en lui la mémoire de ce moment, la rencontre de ces flux, de ces énergies et devient fragment d’une insaisissable rencontre.

Surgit alors au fil de l’eau des oeuvres fines, pleines de grâce, révélées par l’encre de Chine qui trace des contours, qui cerne des volumes. Ces suggestions fragmentaires se révèlent et affirment là où les vides se chargent de sous-entendus.

Mais l’immersion, dans son oeuvre, se dévoile aussi sous des formes plus franches, plus affirmées par des panneaux de bois monochrome qui nous aspirent et nous immergent à leur tour. Ces panneaux deviennent le portail vers ce monde invisible pourtant suggéré. De la surface de l’eau on se retrouve soudainement en apnée, dans les profondeurs, dans cette immobilité pleine de matérialité, pleine de spontanéité.

Il est alors possible de retrouver un point d’accroche dans la série des « land », ces petits formats qui accompagnent l’artiste dans tous ces voyages, dans une production hors de l’eau, où le seul mouvement est alors le geste de la main qui produit ce contrepoint tranquille. Ces dessins deviennent pour Jo Lewis une sorte de méditation, derituel, visant à décharger son esprit de cette obsession spirituelle.

Finalement cette exposition devient une exploration de cette rencontre, où chaque dessin témoigne alors d’une conversation, d’une collaboration.

L’enjeu pour Jo Lewis était alors de réussir à capturer cette essence envoûtante de l’eau et de la transmettre à travers ses dessins, invitant le spectateur à contempler la beauté fragile et éphémère de ces paysages aquatiques lyonnais.

Nous espérons avec cette exposition plonger le visiteur dans une contemplation profonde et méditative où l’immobilité révèlera les tremblements de la vie et entraînera chacun à repenser les liens qui nous unissent à notre environnement.

Trigoust Pau