Exposition «jardin secret» Chahab – La Minoterie Nay

«jardin secret» Chahab
Du 1er octobre au 21 novembre 2021 – Vernissage vendredi 1er octobre 2021 à 18h30
Les routes de la joie : il fallait bien ce petit jeu de mots pour évoquer l’extraordinaire histoire de Chahab dont le nom restera définitivement associé à un lieu qui n’était au départ qu’une friche industrielle. Une minoterie à l’abandon. A l’époque, il n’y avait probablement plus rien à espérer. Se profilait la désolation de voir une ruine de plus se dessiner à l’horizon. Mais voilà qu’un personnage atypique s’y installe avec ses rêves bien exotiques et un gros chantier en perspective… une matière première à sublimer. Une bonne métaphore de son désir créatif. En l’espace d’une décennie, avec une énergie qui dépasse l’entendement, l’artiste aura façonné un lieu d’art sans démolir son âme.
Personnage haut en couleur, au caractère bien trempé, à la démarche cadencée, son œuvre a la saveur colorée d’un récit marqué par le désir du voyage. Chahab est né le 20 octobre 1951 à Téhéran. Il quitte sa terre à 22 ans emportant avec lui tous les mystères d’une civilisation millénaire marquée par ses grandeurs et ses tragédies. Nice, Marseille, Aix-en-Provence seront les villégiatures de sa formation aiguisée par le désir de la rencontre et de la connaissance. En 1997, il s’installe à Nay et fonde cet espace qui ouvrira ses portes en 2000.
L’œuvre de Chahab est teintée par ce monde à la croisée des cultures et par ce goût du «faire ». Comme le décrivait Matisse dans ses cahiers, le «faire » est la qualité première et essentielle de « l’honnête artiste » qui construit pas-à-pas le fauteuil confortable de sa passion. Chahab est d’abord un touche-à-tout pétri de curiosité. Il aura passé un temps certain à dompter toutes les techniques graphiques et picturales : Peinture, sculpture, céramique, gravure et toutes les déclinaisons de l’impression, de la lithographie à la sérigraphie. Enseignant, maître d’atelier, Chahab maitrise donc un «savoir-faire », un gros mot vide de sens, un terme devenu si étrange et que l’on peut aujourd’hui l’ignorer sans vergogne pour s’improviser créateur. Il est pourtant essentiel comme genèse de toute œuvre sincère.
L’artiste, enfermé dans sa tour, scrute d’un œil aiguisé l’horizon pour mesurer d’abord en silence l’enjeu du labeur. Il ne fanfaronne pas. Il va falloir agir.
Suivant ce premier état des lieux, le «faire» n’a pas de résonance sans l’ «agir» qui est ce temps de latence indispensable qui verra naitre l’œuvre de la ruine au terme d’un tâtonnement sans fin, au risque de laisser surgir un capharnaüm.
« Montre-moi ton atelier et je te dirais qui tu es » oserait-on lui faire remarquer en cherchant à comprendre ce qu’il entreprendra encore.
Ce fameux atelier du premier étage est un laboratoire où se mêlent et s’entassent une multitude de projets en cours, d’esquisses, de plaques de métal et de polyméthacrylate, de pinceaux, de pigments, de papiers en tous genres, de toiles, de presses, d’encres, de liants, d’acides… Un tohu-bohu où plane l’image parfaite des derniers modernes mettant leur imaginaire en forme et que le photographe immortalise sur le papier glacé.
On peut se douter que chez l’artiste, cet imaginaire est bien chargé…
« Sa vie entière s’est faite de ces rencontres, de ces échanges, de ces croisements venu fertiliser par leur limon, une nature déjà très ouverte aux souffles qui sillonnent le monde ».
L’œuvre de Chahab est une joyeuse reconstruction de signes graphiques et picturaux puisant évidemment à la source de ses origines et d’une culture riche et lointaine, chargée de symboles et de souvenirs. Ce n’est pas un programme excluant mais une généalogie de l’accueil, de la sagesse et de la plénitude. Ses œuvres portent le message d’une langue rétinienne universelle : une certaine joie à l’œuvre.
Dans cette hiéroglyphie généreuse du passage et de l’envol marquée notamment par la représentation abondante de l’oiseau, Chahab est resté fidèle à lui-même, à la première pierre. Il a davantage glissé au fil des années vers une sorte de réconciliation plastique plus ambitieuse entre la couleur, le trait et leur fusion dans l’espace. D’une fine gravure à une sculpture monumentale d’acier, d’une découpe de lame froide dans la teinte devenue aérienne au picotement de l’acide qui ronge le métal, on peut identifier ce cheminement qui le conduira à la représentation d’un univers onirique en mutation, un peu hors du monde, un rêve que l’on aimait à décrire comme le vol de l’homme, éternel recommencement jusqu’à ce que surgisse la révélation tant convoitée… Pour l’heure, contentons-nous d’une autre parabole : Chahab transforme les gravas en pépites. »
Alain-Jacques Lévrier-Mussat
Nayart – la Minoterie 22 Chemin de la Minoterie · 64800 NAY · Tél. : 05 59 13 91 42
Ouvert du jeudi au dimanche de 14h à 18h.